Deuxième en Clio Cup France dès ses débuts dans la discipline en 2013, David Pouget a rapidement confirmé en obtenant un titre en Clio Cup España et dix places d’honneur sur les podiums généraux finaux entre 2016 et 2022. Toujours lancé à la conquête du succès sur ses terres, le Français a connu une année pleine pour remporter les Clio Cup Series, Clio Cup Europe et Clio Cup France à l’âge de quarante-cinq ans. Le leader du GPA Racing revient sur un parcours brillant parsemé de rencontres, à commencer par sa femme Bénédicte Geyer…

David, comment avez-vous commencé le sport automobile ?
Ma famille est plutôt issue du monde de l’équitation et j’ai découvert ce milieu par l’intermédiaire de Bénédicte, que j’ai rencontrée à l’âge de dix-sept ans. À l’époque, j’étais beaucoup tombé à cheval et j’étais attiré par la mécanique. De son côté, elle faisait du karting et m’y a initié. Je me suis vite rendu compte que l’on maîtrise beaucoup plus de choses dans une voiture. Comme je le dis souvent, ce n’est que du fer. Quand il y a un souci, cela fait moins mal qu’avec un animal où l’affect peut entrer en jeu. Je me suis donc dirigé vers les chevaux-vapeur et je ne le regrette pas. C’est une belle histoire puisque nous sommes toujours ensemble et dans cet univers vingt-huit ans après… Même si nous avons deux chevaux à la maison !

Quelles ont été vos premières étapes en automobile ?
J’ai commencé chez la concurrence en 2000. J’ai effectué deux saisons en Saxo, où nous étions de vrais amateurs avec un fourgon et un plateau. Puis j’ai arrêté pour créer mon entreprise dans le bâtiment. En parallèle, Bénédicte a remporté l’opération Rallye Jeunes fin 2004. De mon côté, j’ai repris en 2005 et nous avons fini vice-champions en 206 l’année suivante, derrière un certain Nicolas Milan. J’ai ensuite été sacré en 2007 et j’ai pu passer en Spider grâce à une bourse. Hélas, notre campagne en Championnat d’Europe avait été un peu compliquée en 2008, donc nous sommes revenus sur des petites formules avec les 207 et 208. Nous avons gagné à quatre reprises le Sprint, dont le format est similaire à la Clio Cup, mais aussi quatre fois le Relais, plus typé endurance. Ces titres sont arrivés en 2013, 2015, 2016 et 2017, mais nous étions déjà actifs en Clio Cup puisque j’y ai fait mes débuts lors de la dernière saison de la troisième génération.

Pourquoi avoir fait le choix de la Clio Cup ?
C’était clairement l’échelon supérieur, mais il faut savoir que Bénédicte et moi faisions uniquement du karting avant d’entamer notre apprentissage du circuit avec Renault. Nous avons découvert le sport automobile en aidant l’écurie Pole Position 81 lors d’un week-end de Coupe Mégane. Ils roulaient à l’époque avec Bruno Cosin et Éric Debard. Cela nous a mis le pied à l’étrier et c’était un peu devenu notre rêve. À partir de 2012, des clients nous ont sollicités et nous avons créé GPA Racing avec un troisième larron, Alexandre Albouy. L’équipe a grandi et l’un de nos buts était de retrouver l’univers Renault et d’y réussir. Arriver en Clio Cup dès 2013 était un premier aboutissement, tout simplement parce que cela reste la formule de promotion mythique en traction.

Vous vous êtes rapidement hissé aux avant-postes de la Clio Cup, mais la couronne vous a un peu résisté. Comment l’avez-vous vécu ?
Pour notre première année, nous étions là pour nous amuser sur deux ou trois courses, mais l’un de mes partenaires a finalement financé toute ma saison. Je m’incline pour quelques points face à Éric Trémoulet, un ami avec qui nous avions passé la soirée avant la finale. Personne ne nous attendait à ce niveau et nous étions déjà très contents. La frustration est venue de la répétition des échecs ces dernières années. Le sacre nous a échappés à deux reprises en raison de casses improbables alors qu’il était à notre portée. Il était temps de gagner et c’est bien de l’avoir fait, même si nous avions eu un titre auparavant en Espagne. Après tant de succès chez la concurrence, je crois que les deuxièmes places en Clio Cup commençaient à m’agacer un peu !

Selon vous, qu’est-ce qui a fait la différence par rapport aux autres années ?
Notre campagne avait débuté de manière mitigée avec deux victoires perdues en raison de pénalités à Nogaro. J’étais un peu énervé et je n’étais pas le seul dans mon équipe comme il y avait eu beaucoup d’incidents durant le week-end. J’accepte très bien la défaite. Cela m’est arrivé, cela m’arrivera encore et je suis le premier à les féliciter les vainqueurs. C’était un peu énervant, car j’avais un sentiment d’injustice, mais je n’étais pas résigné comme ce n’était que la première manche d’une saison marathon. Avec l’expérience, je sais que ça se joue sur la longueur. Cette année, je pense que quatre ou cinq pilotes avaient la vitesse pour s’imposer. Nous avons connu une année pleine, régulière et sans abandon puisque je me suis même vu décompter de gros points. Je crois que la régularité était le maître mot et la réussite nous a enfin souri. Les planètes se sont alignées et nous avons remporté les Clio Cup Series, Clio Cup Europe et Clio Cup France !

Lequel de ces trois titres vous comble le plus ?
L’Europe, car c’est le plus difficile à gagner. J’étais content de celui acquis en Series, mais le fait d’avoir été le seul concurrent à prendre vingt-six départs lui enlève un peu de saveur. En France, nous courions après cette couronne depuis longtemps… Mais l’Europe reste le Graal à mes yeux !

Y a-t-il eu un moment où vous vous êtes dit que le sacre ne pouvait pas vous échapper ?
C’était vraiment tout l’inverse à vrai dire ! Je me suis même demandé si je pouvais tout de même être titré en cas d’abandon lors du tour de décélération après le drapeau à damier de la dernière course à Barcelone. J’ai douté jusqu’au bout, peut-être comme un palliatif pour éviter les déceptions du passé au cas où les choses se passeraient mal. Je n’y croyais pas en arrivant au pied du podium. C’était toutefois une saison extrêmement disputée, avec un adversaire très rapide en fin d’année, Gabriele Torelli. De notre côté, il fallait davantage assurer, ce qui est toujours plus délicat.

L’une de vos prestations vous a-t-elle plus marqué que d’autres ?
J’estime clairement avoir connu mon meilleur week-end à Misano. Cette manche ne comptait pas pour la Clio Cup Europe, mais nous y étions aussi pour faire rouler des GT4 avec l’équipe. Comme il y avait encore de la place dans le camion et que j’aime beaucoup ce tracé, je me suis dit qu’il fallait y mettre ma voiture. Nous y sommes donc allés pour nous amuser et nous avons remporté les deux courses !

Votre passage en GT4 a-t-il été motivé par vos succès en Clio Cup ?
La réussite est évidemment importante, car elle crée des sollicitations. Le fait d’avoir réussi en Clio a attiré des constructeurs pour nous aider à monter en GT4. Les deux sont complémentaires, la Clio étant l’échelon avant le GT4 et il faut se diversifier en tant qu’écurie et qu’entreprise. Je crois également que la Clio Cup est vraiment reconnue et estimée pour son niveau par tout le milieu. Je pense même que certains ne s’y engagent pas en sachant à quel point la Clio Cup est relevée.

GPA Racing a vu plusieurs de ses pilotes gravir les échelons. Quel est le parcours vous ayant le plus marqué ?
Kevin Jimenez me vient tout de suite à l’esprit. Il était encore novice en nous rejoignant pour sa deuxième saison en sport automobile. Nous l’avons fait commencer en formule de promotion avant de passer en Clio Cup, puis en GT4 avec nous. Kevin est l’une de nos plus belles réussites sur le plan de la formation et de l’évolution. C’est aujourd’hui un bon pilote de GT et nous avons vu tout ce que nous pouvions apporter dans le cadre d’un cursus complet. C’est extrêmement valorisant pour l’équipe.

Défendrez-vous votre titre européen l’an prochain ?
Nous partirons bien à la défense de notre couronne. Notre but est d’avoir une équipe plus étoffée en Clio Cup Europe comme nous n’étions pas nombreux sur certains week-ends cette année. Nous aimerions engager cinq ou six voitures sur toute la saison 2024. J’arrive aussi à un âge où je pense de plus en plus à la transmission, surtout maintenant avec un titre en poche. Personnellement, je prends plutôt le côté ludique et l’important est de passer un bon moment. Collectivement, l’objectif est désormais de nous imposer avec d’autres pilotes, comme Alexandre Finkelstein, Alexandre Albouy ou d’autres. Je suis convaincu que la meilleure publicité pour une structure est de faire gagner ses clients. Cela prouve la valeur technique d’une écurie et démontre qu’elle peut vous amener aux avant-postes. Pouvoir progresser via les acquisitions de données et un pilote de référence capable d’aider en piste, c’est le travail que nous vendons, notre fonds de commerce, et c’est tout l’intérêt d’avoir une équipe aujourd’hui.

Quel sera le principal défi en 2024 ?
Le calendrier est un peu plus allégé, ce qui est une bonne chose puisqu’il devenait compliqué d’engager des gens sur treize rendez-vous. Nous arrivions à certaines limites, tant sur les coûts que sur les organismes. Cependant, l’abandon des courses joker fait que tous les résultats compteront. Les erreurs coûteront plus cher et les plus expérimentés, comme moi, pourraient en tirer profit. Chaque course sera encore plus importante.

Qui attendez-vous au tournant ?
Certains pilotes devraient monter en puissance, à commencer par mes équipiers. Cette année, Alexandre Finkelstein a démontré sa capacité de gagner et je pense qu’il peut prétendre au titre dès l’an prochain. Face à nous, nous avons récemment l’arrivée de Rangoni Corse, une structure très professionnelle avec un pilote de qualité. Je suis convaincu qu’ils remettront cela, avec Gabriele ou quelqu’un d’autre. Des équipes de grande valeur viennent et d’autres suivront, ce qui montre tout l’attrait de la Clio Cup, et tant mieux !

Portimão fera son apparition au calendrier, Hockenheim son retour. Qu’en pensez-vous ?
Je ne connais pas Portimão, mais ce circuit a très bonne presse. Beaucoup d’amis y ont déjà roulé et ne m’en ont dit que du bien. Je suis très content de découvrir de nouveaux tracés après plus de vingt ans de licence et cela s’annonce amusant avec nos voitures. Cela apporte de la fraîcheur, car peu de pilotes ont de l’expérience dessus et la piste est assez loin pour aller la reconnaître. Cela devrait être une belle surprise. Mon seul regret est l’absence de Zandvoort, que j’ai beaucoup apprécié, mais on ne peut pas tout avoir !

Que pensez-vous de cette génération de Clio Cup ?
Nous sommes reconnaissants envers Renault d’avoir lancé une nouvelle génération faisant perdurer la Clio Cup, car je n’oublie pas que c’est un effort de leur part. La première version demandait un peu de travail sur l’allonge, mais une évolution a corrigé ce souci dès 2021. Aujourd’hui, elle répond à 100 % de mes attentes et tous mes clients sont très heureux et se régalent à son volant. Cette Clio Cup est très ludique et facile à prendre en main. Elle nous permet tous de rouler et de nous faire plaisir en toute sécurité. Cependant, c’est aussi devenu beaucoup plus difficile de faire la différence et de s’échapper en tête puisqu’elle aspire beaucoup et qu’elle n’est pas du tout piégeuse. Cela offre des courses spectaculaires où nous sommes tous regroupés en peloton jusqu’à l’arrivée. Pour les « Clio Boys », la référence était la troisième génération de Clio Cup, une voiture que beaucoup de pilotes ont appréciée. Concrètement, nous sommes revenus dans ces standards et c’est plutôt une excellente chose.

En rencontrant Bénédicte, imaginiez-vous un tel destin ?
Honnêtement, non ! J’étais déjà comme un gamin à nettoyer des jantes de Mégane, mais nous sommes tous les deux passionnés par ce que nous faisons. Nous n’avions pas le projet de monter une structure et nous avons vraiment tout fait comme bon nous semblait, guidés par la passion. Les clients nous ont sollicités et cela a pris de l’ampleur jusqu’en GT4, mais je n’aurais jamais soupçonné cela durant mes premières années, ni même il y a dix ans. La vie est faite de belles rencontres, avec des gens qui m’ont aidé ou qui ont acheté mes voitures de course pour me soutenir. C’est une belle histoire, mais totalement insoupçonnée à la base.

Cette année, nous avons vu vos fils récupérer quelques trophées. La prochaine génération est-elle déjà en marche ?
Nous avons eu nos deux enfants avant de créer notre équipe, donc ils ont toujours baigné dans cet environnement. Quand vos parents mangent, boivent et dorment sport automobile, cela devient difficile de leur faire voir autre chose… Le père que je suis a envie de dire que cela dépendra de leurs résultats scolaires ! Une part de nous a peur qu’ils soient déçus, mais j’aimerais un jour partager la piste avec mes fils si je ne suis pas trop vieux d’ici là. Nous verrons bien dans quelques années !

Que peut-on vous souhaiter de mieux à l’avenir ?
Que les prochaines années soient aussi bonnes que les vingt dernières. Nous ne demandons pas plus ! Honnêtement, nous n’avons pas vu passer les vingt-huit dernières années, donc cela sera bon signe si les vingt-huit prochaines sont du même acabit !

Un mot pour finir ?
Je tiens absolument à remercier toutes les personnes m’ayant soutenu dans le passé et aujourd’hui. Ils étaient là quand nous avons perdu, et tous les mécaniciens, ingénieurs et partenaires de mon équipe m’ont toujours soutenu et sont restés à nos côtés. Ces titres sont également les leurs et ils les méritent plus que quiconque.

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